Soil microbial diversity drives the priming effect along climate gradients – A case study in Madagascar.
Kanto Razanamalala, Tantely Razafimbelo, Pierre-Alain Maron, Lionel Ranjard, Nicolas Chemidlin, Mélanie Lelièvre, Samuel Dequiedt, Volaniaina H. Ramaroson, Claire Marsden, Thierry Becquer, Jean Trap, Eric Blanchart & Laetitia Bernard
Organisation de l'étude
Dans cette étude, nous avons étudié des sols « naturels » de savanes herbacées (Bozaka) sous l’influence d’un gradient climatique à deux composantes (température et pluviométrie). Pour cela, nous avons réalisé un échantillonnage centré sur les Hauts plateaux et orienté sur des transects permettant de mettre en valeur tantôt l’effet « température moyenne annuelle », tantôt l’effet « pluviométrie annuelle ».
Analyses
Sur les sols prélevés nous avons mesuré la densité apparente, l'humidité, le pH, la texture, le contenu en C, N et P, les nutriments disponibles (NH4 et NO3 et PO4). Nous avons prédit la minéralogie (kaolinite, Gibbsite, Al_cbd...) par NIRS. Nous avons également quantifié le P microbien et la quantité d'ADN extrait par g de sol (biomasse moléculaire), ainsi que le nombre de gènes codant pour les ARN 16S et 18S. Sur les ADN extrait, la composition des communautés bactériennes et fongiques a été décrite par pyroséquençage.
Les sols ont ensuite été mis en incubation avec ou sans un apport de paille de blé enrichi à 7% en 13C, sous forme de poudre. Le CO2 et le 13CO2, ont été mesurés à 7 et 42 jours. A ces deux temps d'incubation, ont pu être calculés la respiration basale (BR), la minéralisation de la paille (SM) et le Priming Effect (PE).
Acteurs du PE
Dans cette étude, nous avons confronté les données de la littérature aux corrélations que nous trouvions entre la densité relative des différents groupes phylogénétiques bactériens et fongiques dans les sols prélevés avec l’intensité des différentes minéralisations (respiration basale, minéralisation des substrats enrichis en 13C et PE). Nous avons remarqué qu'aucun groupe fongique n'était corrélé aux différentes minéralisations. Nous avons également observé que les populations positivement corrélées au PE à 7 jours (stoechiométrique) étaient plutôt des "décomposeurs", tandis que ceux corrélés au PE à 42 jours étaient plutôt des "mineurs"
Déterminants proximaux du PE
La matière organique des sols (MOS) de savanes présentait, le long des gradients climatiques, des teneurs et des C:N différents, reflétant son état d’évolution. La MOS à C:N élevée est généralement une MO peu évoluée, riche en carbone labile. La MOS à faible C:N est une MO évoluée enrichie en azote par rapport au carbone à cause de la perte de son carbone par la respiration hétérotrophe. L’incubation de ces sols, en utilisant de la paille de blé marquée, a permis d’observer que la qualité, et pas seulement la quantité, de la MOS était un déterminant des processus de génération de PE. Un PE précoce (7 jours) était positivement corrélé à la quantité de MOS et à son C:N, qui favorisaient une biomasse microbienne plus élevée et plus enrichie en décomposeurs. Nous en avons déduit qu’il s’agissait bien d’un PE stœchiométriques malgré l’absence de corrélation avec la teneur en azote minéral du sol. Le PE tardif (42 jours) était négativement corrélé à la quantité de MOS, son C:N et la biomasse microbienne, mais positivement corrélé à la guilde des mineurs. Nous en avons donc déduit qu’il avait été généré par « nutrient mining ».
Effet du Climat
Dans cette étude, la distribution des sols de savane sur trois gradients climatiques nous a permis de dissocier les effets de la température et de la pluviométrie annuelle sur les minéralisations des MO et le PE. La minéralisation basale de la MOS était négativement corrélée à la température. Si on transpose nos observations dans un contexte de réchauffement climatique, cette relation négative confirme ainsi l’adaptation thermique de la réponse de l’activité de la communauté microbienne observée dans la littérature. La température était positivement corrélée à l’état d’évolution de la MOS et a entrainé la réduction du pool de MOS de haute qualité. De plus, la température était négativement corrélée à la biomasse microbienne et à la taille des guildes des opportunistes et des décomposeurs. Enfin le PE stoechiométrique et celui généré par « nutrient mining » étaient tous les deux respectivement corrélés négativement et positivement à la température annuelle. Nous en avons déduit que dans les climats tropicaux d’altitude, où il fait moins chaud, la décomposition de la MOS devrait être ralentie tandis que les apports de la production primaire augmenteraient. La MOS peu évoluée s’accumulerait dans les sols entretenant ainsi la guilde des décomposeurs. Les décomposeurs étant plus compétitifs que les mineurs pour l’accès à la matière organique fraiche (MOF) apportée, cette MOF va plutôt générer un PE de type stoechiométrique. A l’inverse, dans les climats plus chauds, en bas des Hauts plateaux, la décomposition plus rapide de la MO associée à une production primaire plus faible entrainerait l’épuisement rapide de la MOS à fort C:N. Cette MOS peu évoluée n’entretiendrait plus cette guilde des décomposeurs. Les populations de décomposeurs devant se reconstituer à chaque nouvel apport de MOF, laisseraient ainsi aux mineurs un accès plus facile à la MOF apportée.
Cette étude a été publiée dans ISME journal:
Razanamalala, K., Razafimbelo, T., Maron, P.-A., Ranjard, L., Chemidlin, N., Lelièvre, M., Dequiedt, S., Ramaroson, V.H., Marsden, C., Becquer, T., Trap, J., Blanchart, E., Bernard, L., 2017. Soil microbial diversity drives the priming effect along climate gradients – A case study in Madagascar. The ISME j. DOI: 10.1038/ismej.2017.178.