Pédologie

carte pédologique de Madagascar. Classification FAO de 1974

Madagascar présente une grande diversité de sols dont l’étude a été initié dès les années 1900 et dont la première cartographie a été réalisée en 1937 par Besairie (Erhart, 1926; Feller et al., 2007). Différentes classifications ont été élaborées en fonction des processus de pédogenèse ou en fonction de leurs propriétés. La classification de la FAO constitue une  synthèse  efficace  entre  les  différents  systèmes  de classification et est beaucoup utilisé dans les publications scientifiques. Dans ce projet, nous nous sommes focalisé sur les Ferralsols qui couvrent plus de 35% de la superficie de l’Ile. Ils sont principalement situés sur les Hautes Terres et la partie Est de l’île. Les Ferralsols sont des sols profonds caractérisés par une importante altération aboutissant à des matériaux argileux, pouvant contenir des hydroxydes d’aluminium et ont une capacité d’échange cationique inférieure à 16 cmol+.kg-1.

Climats

En plus de cette grande diversité de sols, Madagascar se trouve dans la zone intertropicale et est soumise à une grande diversité de climats. La carte des régions climatiques par Raunet (1997) montre 6 types de climat dont les critères de classification sont basés sur la pluviométrie annuelle moyenne, puis sur la température moyenne du mois le plus sec et sur le nombre de mois secs. Ces types de climat varient donc d’un climat perhumide, à pluviométrie annuelle supérieure à 2000 mm (côte Est de l’île) à un climat très aride avec une pluviométrie annuelle inférieure à 400 mm (extrême sud-ouest de l’île). La zone des Hauts Plateaux, au centre de l’île et point central de ce travail de thèse correspond à un climat subhumide d’altitude avec une pluviométrie annuelle comprise entre 1000 et 1500 mm. Cette variété de climats entraine une grande biodiversité et une grande diversité de paysages. Ainsi, le pays présente de nombreuses régions agro-économiques lui conférant de grandes potentialités agricoles et une grande diversité de productions végétales. 

 

Enfants dans la rue, Lac Aloatra mars 2011- Photo Laetitia Bernard

L'insécurité alimentaire

Selon une projection réalisée par International Statistics (2012), la population malgache atteindra 28.374.000 en 2020. Par contre les gains en production alimentaire, surtout pour le riz, resteront inférieurs au rythme de croissance de la population. Près de 76% de la population souffrent de carence alimentaire à Madagascar (INSTAT, 2013) avec une grande prévalence dans les milieux ruraux. Le développement agricole durable est fondamental pour la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté, (Pretty et al., 2011).

L’agriculture emploie 72% de la population active malgache pour 26% du PIB et fournit l’essentiel de la consommation alimentaire des ménages (Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique [MESupReS], 2015). De plus, le secteur agricole joue également un rôle important dans les échanges commerciaux de Madagascar (Ministère de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche [MAEP], 2009). La polyculture est pratiquée par 83% des exploitations agricoles avec les cultures vivrières, telles que le riz ou le manioc, généralement destinées à l’autoconsommation. (INSTAT, 2013). Les ménages agricoles s’adonnent en général à environ moins de 5 cultures, au cours d’une campagne. L’agriculture traditionnelle, peu intensive, présente de faibles rendements directement liés à la faible taille des exploitations (moins de 1,5 ha) et à la faible fertilité des sols. Le riz, première culture du pays, est cultivé dans les bas-fonds, dans les plaines et la riziculture pluviale prendre de plus en plus d’essors sur les sols des tanety.  Aliment de base, avec une consommation annuelle de 130 kg par habitant, le riz occupe une place importante dans la culture malgache. Pourtant, Madagascar n’est plus autosuffisant en riz et en importe annuellement 162.000 tonnes (MESupReS, 2015). De plus, en 2010, le taux de pauvreté rurale était presque deux fois plus élevé que celui relevé dans les zones urbaines (Banque mondiale, 2015).

 

L'agriculture des Hauts Plateaux

Sur les Hauts plateaux, la surface agricole potentielle pouvant se prêter aux grandes cultures et aux zones de pâturage est estimée à plus de 35 millions d’hectares et 65% de cette surface agricole utile est située sur les collines ou « tanety ». Ainsi ces « tanety », sous climat subhumide, représentent un fort potentiel pour augmenter la production agricole malgache (Rabeharisoa, 2004). Cependant, les sols des « tanety », majoritairement du type Ferralsol, présente des teneurs élevées en hydroxydes de fer et d’aluminium (Ségalen, 1994; Chávez et al., 2009), limitant ainsi la biodisponibilité du phosphore. De plus, dans ces sols ferrallitiques âgés et sensibles à l’érosion, l'azote minéral est vite perdu par lixiviation. Les sols ferrallitiques sont donc des sols très sensibles à l’érosion surtout après élimination de la couverture végétale. Les sommets et les pentes sont alors érodés, entrainant ainsi la disparition des couches arables des champs de culture et l’ensablement des bas-fonds (MESupReS, 2015). Cette érosion des sols de « tanety » peut être le résultat de certaines pratiques traditionnelles sur-utilisées à cause de la pression démographique. Les feux de brousses et feux de forêts, dont les raisons sont multiples, sont une des principales causes de destruction des ressources naturelles à Madagascar. En effet, les feux ne détruisent pas seulement la végétation mais s’attaquent également au système pédologique et hydrique (MESupReS, 2015). La culture sur brûlis reste la pression majeure et déterminante sur l’équilibre de l’écosystème forestier. Plusieurs habitats écologiques sont ainsi détruits (MESupReS, 2015). Ces pratiques sont notamment liées au fait que le coût des intrants chimiques les rend pratiquement inaccessibles à la majorité des paysans (Andrianjafy Andriamanindrisoa, 2004 ; INSTAT 2013). La gestion des déchets organiques, tels que les résidus de récolte, composts ou fumiers animaux, peut ainsi apparaitre comme une meilleure alternative pour la fertilisation des systèmes de culture.

Dans le contexte actuel de d’adaptation et lutte contre le changement climatique et d’augmentation de la sécurité alimentaire pour les populations, une agriculture basée sur la gestion des matières organiques des exploitations agricoles permettrait de gérer, voire d’améliorer, la fertilité des sols ferrallitiques tout en permettant de contrebalancer les flux de gaz à effet de serre (Agren, 2010). Pour cela, il est nécessaire d’utiliser des pratiques agricoles permettant de diriger les processus du sol tels que l’humification de la matière organique ou plus généralement le stockage de carbone dans le sol mais également d’utiliser des pratiques agricoles promouvant la biodiversité des sols.